La musique Folk s’est trouvé une nouvelle ambassadrice, en la personne de la chanteuse et guitariste toulousaine Julii Sharp, à la faveur d’un très bon premier EP sur l’excellent label indé Only Lovers Records ( The Big Idea, Queen Of The Meadow, Sunflowers,…). Loin d’être une inconnue, puisqu’elle s’est fait repérer lors de son passage aux iNOUIS du Printemps de Bourges en 2022, cette jeune musicienne a déjà tout d’une grande. Le français et l’anglais se disputent la vedette dans ce disque élégant et référencé, qui n’a pourtant rien d’un exercice de style forcé et scolaire. La musique folk est ici le chemin d’une expression vocale libérée et généreuse, sans complexe, pouvant aussi bien évoquer la poésie romantique de Françoise Hardy ( “Je t’aime”) dans la langue de Molière que les subtiles nuances d’Alela Diane dans son versant anglo-saxon ( “Cricket’s Creed”).

Mais l’énergie du rock n’est jamais bien loin, comme dans les plus belles envolées du band  du musicien américain Bonnie Prince Billie ( venant d’ailleurs de sortir un album magnifique il y a quelques semaines), histoire de rappeler au combien l’héritage de Bob Dylan ( qui osa brancher sa guitare sur un ampli au festival de Newport en 1965) est encore bien présent dans la musique des jeunes artistes tout comme  les digressions du grand solitaire Neil Young, apôtre inégalé de l’évasion par la distorsion.

Pour Julii Sharp, l’électricité est une manière de jouer avec le temps, de se perdre dans l’émotion, de vibrer pleinement avec le corps, pour prolonger le sens des mots dans le son, en particulier dans le final de “Heave” ou encore dans les élans vocaux de “Magic In Town” n’ayant rien à envier à l’immense Anna Calvi. A l’image de ses concerts altruisteset malins, sans oublier d’être intenses, la jeune artiste sait aussi invoquer de merveilleux instants de grâce, au point de rappeler par instants la fraîcheur incandescente du Live At-Siné de Jeff Buckley. Et dire que Julii Sharp n’a pour l’instant qu’entrouvert les premières pages de son livre des possibles. 

Note: 16/20

LAURENT THORE