Cette semaine, deux albums se dĂ©marquent nettement : Nicolas Comment et Helena Deland ont rĂ©alisĂ© des merveilles. Cependant, It It Anita se glisse en embuscade avec une proposition radicalement diffĂ©rente mais diablement efficace. Il s’agit sans doute de l’une des semaines les plus remarquables de l’annĂ©e en termes de sorties d’album.

đŸ”ș Nicolas Comment – BLASON

Nicolas arrive avec une proposition d’une rare intensitĂ© pour son troisiĂšme album, qui est une vĂ©ritable odyssĂ©e au pays du beau. Sa force rĂ©side dans la cohĂ©rence de l’Ɠuvre de bout en bout, bien que chaque titre possĂšde son propre univers. Certains sont aussi symboliques qu’enjouĂ©s, tandis que d’autres sont Ăąpres et matures. Les tableaux s’enchaĂźnent avec une incroyable clartĂ©, chaque orchestration semble susciter les paroles naturellement, et tout coule de source, c’est presque Ă©vident. On ressent l’amour pour les ĂȘtres et les icĂŽnes, tout devient matiĂšre Ă  cĂ©lĂ©brer, et on est entraĂźnĂ© dans ce monde. Nicolas est accompagnĂ© par Milo et Brisa Ă  certains moments, et leurs interventions sont sublimĂ©es par le reste de l’album.

On y retrouve des orchestrations variĂ©es, rappelant  BRMC et d’autres quasi Gainsbourienne, ce qui crĂ©e un univers vaste, aĂ©rĂ©, riche en dĂ©tails et en finesse. Les voix de Nicolas et de ses comparses se posent avec une certaine majestĂ© dans cet Ă©crin sonore. Les paroles quand Ă  elles sont bien senties, entre du factuel, de la prose et du ressenti, plein de name-dropping Ă©nigmatique. On se perd avec dĂ©lice dans le cortex cĂ©rĂ©bral de notre hĂŽte, dĂ©couvrant de nouveaux points de vues.

Étant plutĂŽt amateur de musique anglophone, mes normes ont Ă©tĂ© bousculĂ©es par « Blason ». Je pourrais vous dĂ©cortiquer chaque titre et expliquer pourquoi je les aime, pourquoi il est intĂ©ressant de les Ă©couter un par un. Cependant, cet opus n’est pas une simple collection de singles, c’est la bande-son d’un Ă©tat d’esprit et d’une esthĂ©tique vers lesquels il semble bon d’aller. Plus on l’Ă©coute, plus on l’apprĂ©cie, plus l’album s’insinue en nous et fait partie de notre quotidien. Ne deviendrait-il pas iconique pour le coup ?

Note : 19 /20

đŸ”ș Helena Deland – ‘Goodnight Summerland’ 

Le second Album d’Helena Deland arrive enfin, et dĂšs le dĂ©but elle empoigne sa vulnĂ©rabilitĂ© et nous l’expose sans phare . Un album inspirĂ© partiellement,  par la mort de sa mĂšre. Mais plutĂŽt que d’aller vers une Ɠuvre noire, l’horizon funĂšbre se fait ici lumineux,  tout est sous un soleil nostalgique et bienveillant, le polaroid d’un eden. Une production impeccable, des voix envoĂ»tantes qu’on croirait sorties tout droit de l’hĂ©ritage de la sublime et regrettĂ©e Julie Cruise. Un mĂ©lange angĂ©lique avec de sublime contre-chant. Un vrai must, le phrasĂ© quant Ă  lui est inventif. 

Sur la chanson “Drawbridge” on dirait un hommage Ă  “Mightnight cowboy” l’un des sublimes titres du film “Cowboy Junkies” Ă©crits par John Barry. Bref hommage appuyĂ© ou simple coĂŻncidence, les deux options me vont. Et ne gĂąche en rien le plaisir d’Ă©couter ce titre en tout point sublime. 

La voix joue admirablement sur le souffle, notamment sur des titres comme “Who I sound like”. Peut-il y avoir un reproche Ă  ce disque. Non pas vraiment, si vous cherchez des titres pop, passez votre chemin. Mais bon, par contre, cet album pousse toute personne qui l’Ă©coute Ă  croire qu’on ne l’a Ă©crit que pour lui,  les admirateurs de folk et d’introspection trouveront ici tout ce qu’il leur faut. Tellement l’intime est poussĂ© Ă  son paroxysme par cette voix et cette interprĂ©tation aussi gracieuse que sincĂšre.

Note:18/20

đŸ”ș IT IT ANITA – MOUCHE

Dans une autre vie, j’ai eu le plaisir d’accueillir le groupe Ă  La Malterie Ă  Lille, et le concert avait Ă©tĂ© une vĂ©ritable rĂ©ussite. It It Anita est un groupe de scĂšne incroyable, et honte Ă  moi, je n’avais jamais pris le temps d’écouter leur discographie. Alors, que donne ce dernier opus ? Je l’ai trouvĂ© plus percutant que ce que j’avais pu voir sur scĂšne. Un mĂ©lange ultra efficace de la premiĂšre Ă©poque d’ Helmet, des Butthole Surfers, voire mĂȘme de Girls Against Boys. C’est tranchant, c’est un son trĂšs frontal, mais en mĂȘme temps, il y a pas mal de variĂ©tĂ© de styles, et l’album se tient sans temps mort. Un groove lourd et rugueux imprĂšgne le tout. 

Ça commence avec le trĂšs bon “Crippling Guilt”, dont le phrasĂ© du chant ferait presque penser par moment Ă  Henry Rollins, et les chƓurs sont vraiment drĂŽles et bien trouvĂ©s. “Disgrace” et “Giving / Taking” ont un cĂŽtĂ© trĂšs Girls Against Boys. “Psychorigid” apporte une petite pause de variĂ©tĂ© bienvenue. Le titre a un cĂŽtĂ© dĂ©glinguĂ© trĂšs sympa avec un faux phrasĂ© rap old school. Il n’y a pas de single ou de moment plus fort qu’un autre, car cette galette est bourrĂ©e de titres impeccables et rien n’est Ă  jeter. 

Le groupe a eu la bonne idĂ©e de ne pas pousser le vice au-delĂ  de 9 titres, car c’est sans doute la sĂ©lection qui suffisait Ă  leur bonheur. Tant mieux, sage dĂ©cision. MĂȘme au bout d’une petite dizaine d’Ă©coutes, je n’ai jamais eu envie de sauter le moindre titre. Well done, c’est parfait, et cela me fait dire que je vais devoir m’attarder honteusement sur le reste de leur discographie. 

Note : 16/20

đŸ”ș Rose Tiger – « The End Forever » 

Un sentiment ambivalent m’Ă©treint souvent quand je pense Ă  ce groupe. Il fait merveilleusement bien ce qu’il fait, c’est une pop classique et classieuse, trĂšs glamour, avec de superbes arrangements. Les voix sont gĂ©niales qui alterne avec malice entre les voix fĂ©minine et masculine , certains titres pourraient presque figurer dans la BO de “Franky Horror Picture Show”.  

À mes yeux, l’album se divise presque en deux parties. La premiĂšre est talentueuse, inventive, sans faute de goĂ»t, mais elle manque d’un je-ne-sais-quoi. La seconde partie, qui pour moi commence avec le trĂšs bon “Camelia” et se finit avec “Meet me at the Cemetery”, entre ces deux titres, de vraies pĂ©pites, comme le superbe “When You’re Here”, digne d’un titre de T-Rex. Puis le superbe “Unusual Trouble” avec son refrain trĂšs 80’s, et le titre “I Won’t Go Back” enfonce le clou avant le sublime “Meet me at the Cemetery”. Cette seconde partie vaut Ă  elle seule le coup. C’est formellement super, mais il me manque un truc sur la globalitĂ© de cet album, cela Ă©tant dit je pense que c’est intrinsĂšque Ă  ce type de musique et Ă  mes goĂ»ts personnels. Amoureux des belles compositions et du travail impeccable, c’est pour vous. Il est Ă©vident que c’est une vraie rĂ©ussite, qui, Ă  mon avis, prouve surtout que le groupe est talentueux et qu’il faudra compter sur eux dans l’avenir. 

Note : 13/20

đŸ”ș Allah-Las – ZUMA 85

L’étĂ© est fini, mais pas tout Ă  fait en fait, grĂące Ă  Allah-Las, un long John dans la main droite, les Allah-Las dans les oreilles, et vous voilĂ  reparti en vacances. Une musique vintage, des riffs ensoleillĂ©s comme passĂ©s sous les sunlights. « Zuma 85 » s’écoute de bout en bout sans difficultĂ©s. Le temps fort arrive Ă  mes yeux avec le trĂšs bon « Right on Time » Ă  la troisiĂšme place (comme d’habitude). C’est de bonne facture, rien de nĂ©gatif, mais rien de fou non plus, c’est selon vos goĂ»ts.

Note : 13/20

đŸ”ș Munya – JARDIN

est encore une bonne surprise du cĂŽtĂ© du QuĂ©bec, comme c’est souvent le cas, il faut se le dire. Ici, MUNYA nous propose son propre style, le « New Synth Folk », avec une touche de pop, d’indie, de sitar, de dance et de R&B. Cela rappelle un peu les Cardigans, mais en plus sucrĂ©. L’album se tient de bout en bout, sans fausses notes, pour les fans de pop sucrĂ©e et exigeante. 

Note : 12/20

đŸ”ș Marek Zerba – FIASCO

Marek arrive avec « Fiasco », qui a le mĂ©rite de chercher sa propre voie. On dirait une compilation indie des dĂ©buts des annĂ©es 90, avec des influences de Happy Mondays, Charlatans et Stereo Lab. La production est parfaite et atteint largement son but, le tout avec des paroles en français plutĂŽt orientĂ©es vers le fun. C’est crĂ©atif et mĂ©rite grandement votre attention. 

Note : 12/20

đŸ”ș CROSSES – « Goodnight, God Bless, I Love You, Delete »

Dieu sait que je suis un grand fan de Deftones et de la voix de Chino Moreno. Mais dĂšs le dĂ©but de l’album, j’ai malheureusement eu l’impression d’une parodie fadasse. Avec une prise de risque Ă  zĂ©ro, rien que NIN n’avait dĂ©jĂ  fait il y a 30 ans, en mieux. Un Kid Cudi avec « Man on the Moon III » a un phrasĂ© mille fois plus inventif, la production ne vient en aucun cas sauver le tout, quelques jolies moments, mais mon admiration pour l’un des protagonistes, ne me fera pas changer d’avis. Ok, Chino a une superbe voix, mais bon, le compte n’y est pas Ă  de mon point de vue. C’est sans intĂ©rĂȘt, pour moi hĂ©las. 

Note : 6/20