Superbement empaqueté par les éditions Urban, The Ridler – Année Un est un récit complet scénarisé par l’acteur Paul Dano qui jouait déjà le rôle de The Ridler dans le Batman de Matt Reeves. Il s’agit d’un thriller où Batman n’apparaît pas du tout, l’histoire se concentrant sur les origines revisitées d’un ennemi emblématique de l’homme chauve-souris. Pas de super-bastons donc, mais une spirale descendante où, comme dans le film Joker, le vilain choisit la voie de la criminalité comme un acte de révolte personnelle face aux injustices de Gotham City.
Ici donc, le futur vilain, Edward Nashton, est un expert comptable qui, en découvrant des irrégularités dans les comptes de son employeur, va remonter jusqu’à la fortune de la famille Wayne et sombrer dans les sables mouvants d’une existence dépourvue de tous plaisirs humains.
Tout au long de l’album, le personnage se répète à lui-même qu’il compte ; un double sens cruel et ironique venant d’un comptable qui ne compte pour personne. Pour son premier scénario, Paul Dano fait montre d’une belle audace : épaulé efficacement par Stevan Subic qui, fort de son héritage de Bill Sienkiewicz ou récemment de Martin Simmonds (The Department of Truth), offre des visuels tout droits sortis de Seven où il ne manque que la voix de Kurt Cobain chantant sa vie sous les ponts pour saupoudrer le tout d’arômes du désespoir.
La clé d’un Batman réussi est souvent d’entrecroiser les traumatismes du vilain avec celui du héros. Paul Dano s’acquitte de cette tache sans faillir en appellant que sans Batman pour l’inspirer, The Riddler n’aurait jamais émergé ; ou quand un symbole d’espoir réveille le désespoir d’un individu dangereux qui va sublimer sa souffrance pour être à la hauteur du justicier. On appréciera de voir Dano conjuguer les destins des jeunes Bruce Wayne et Edward Nashton comme pouvait le faire le générique d’Amicalement Vôtre.
Si l’écriture de Dano n’est pas exempte de défauts de jeunesse (une tendance à la redite, la prépondérance du climax au détriment de l’énergie et le développement d’une intrigue peu passionnante dont le lecteur a vite fait le tour), The Ridler – Année un peut se targuer d’une ambiance oppressante assez rare dans le comics mainstream et d’une véritable audace artistique notamment dans le chapitre 5 uniquement constitué de parchemins, journaux de bord ou de photos comme au bon vieux temps de Watchmen. Ou de Seven. Ou, bien entendu, des comics Vertigo qui proposaient des comics d’adultes pour adultes.
The Ridler – Année Un Par Paul Dano et Stevan Subic Urban Comics – 24 €
Un article de Bruce Tringale